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WhoFi : la nouvelle frontière de l’identification ?

Dernière mise à jour : 16 août

Cinq hommes numérisés par la technique WhoFi.
À chaque individu, son empreinte électromagnétique numérisée.

Introduction


WhoFi est une technologie émergente d’identification biométrique qui s’appuie sur l’analyse des perturbations du signal Wi-Fi, provoquées par la présence humaine, un peu comme l’effet Doppler d’un radar.


Contrairement aux méthodes traditionnelles (empreintes digitales, oculaires ou palmaires, et reconnaissance faciale) WhoFi fonctionne sans contact visuel ni capteur dédié, il suffit que le sujet entre dans une zone couverte par un réseau Wi-Fi !


En 2025, des chercheurs italiens ont présenté cette approche comme une solution capable d’identifier une personne, ou un animal, à travers un simple réseau Wi-Fi, ouvrant de nouvelles perspectives dans la sécurité et la surveillance.


Historique


La genèse de WhoFi remonte à 2020, lorsque l’équipe de l’Université La Sapienza de Rome, a exploré l’idée d’utiliser le réseau d’ondes des réseaux Wi-Fi pour l’identification ; le projet se nommait alors EyeFi.


Leur prototype initial du logiciel atteignait environ 75 % de précision en conditions contrôlées : bien, mais pas encore suffisant !


Face à ces résultats prometteurs, les chercheurs ont affiné l’extraction de la Channel State Information (CSI) en français l'état du signal, en optimisant leurs algorithmes d’apprentissage.


En 2023, l’usage de réseaux de neurones convolutifs (CCN) spécialisés dans le traitement des images, a permis d’augmenter la précision à près de 90 %.


Quelques mois plus tard, l’intégration d’architectures Transformer, spécialisées dans la capture de dépendances à long terme dans un contexte, a permis d’atteindre 95 % de fiabilité dans l’identification d’un sujet.


Notons que ce résultat est un peu moins précis que la reconnaissance faciale (99%) qui nécessite cependant une vue directe du visage dégagé, et dans un angle exploitable, pour parvenir à une telle performance.


Et techniquement ?


Le Wi-Fi émet des ondes électromagnétiques qui se propagent, se réfléchissent ou se diffractent au contact d’objets et de personnes, voire d’animaux.


Les variations subtiles de ces ondes — mesurées par la CSI — portent la trace des caractéristiques corporelles de chacun : taille, densité osseuse, forme des organes, composition tissulaire, etc.


WhoFi collecte ces mesures en temps réel et les transmet à une IA, un modèle d’apprentissage profond dédié. Celui-ci transforme la séquence de CSI en une empreinte radio unique, à l’instar de la banque d’identification des radars pour les aéronefs.


Grâce à un apprentissage supervisé, le système associe chaque empreinte à un individu connu, même si ce dernier cherche à se dissimuler, se déplace ou change de posture.


Cette méthode d’identification nécessite donc d’avoir déjà scanné un sujet précisément identifié pour parvenir à le reconnaitre, exactement comme toutes les autres techniques biométriques.


Quels avantages pour le WhoFi ?


• Précision élevée (95 % en mode d’identification parmi un groupe) supérieure si le sujet est seul, et vitesse d’identification : moins d’une seconde après collecte des données.


• Insensible au changement d’environnement (meubles déplacés, autres lieux).

• Tout aussi insensible aux vêtements portés par le sujet, à sa posture, ou à sa volonté de passer inaperçu, comme en se couvrant une partie du visage, ou en baissant la tête pour échapper aux caméras de reconnaissance faciale.


• Fonctionne à travers les murs (comme le signal Wi-Fi) et dans l’obscurité totale ; et comparé aux caméras et scanners classiques, WhoFi ne requiert aucun éclairage ni ligne de vue directe.


Pour quels usages ?


• Contrôle d’accès sans contact dans les bâtiments sécurisés.


• Suivi des mouvements de personnel sensibles (centres de données, laboratoires, bâtiments militaires, etc.).


• Amélioration des systèmes de domotique pour adapter l’environnement aux habitants, y compris aux animaux.


• Analyse du flux de visiteurs en magasin sans recourir à la vidéo


• Coût très bas, et principalement logiciel, car la plupart des bâtiments sont déjà équipés d’un réseau Wi-Fi, maisons individuelles comprises.


Chaque déploiement nécessite toutefois un réseau Wi-Fi suffisamment dense et une préconfiguration des identités des utilisateurs, car, avec cette technique, on ne peut identifier une personne que si on possède son empreinte électromagnétique au préalable.


Enjeux éthiques et juridiques


WhoFi soulève des questions majeures de vie privée et de consentement.


À la différence des caméras, la technologie reste invisible et peut opérer sans que l’individu en soit conscient, mais c’est aussi le cas pour les drones, et les caméras dissimulées, et/ou à longue portée, perchées sur des mats ou sûr les flancs des hauts immeubles.


Comme pour la surveillance vidéo, des régulations nationales et européennes devront donc préciser :


• Les conditions de collecte et de conservation des empreintes électromagnétiques

• Les droits d’opposition et d’effacement pour les personnes identifiées


• Les garanties contre l’utilisation abusive (publicité ciblée, surveillance généralisée, notamment).


Car, sans cadre clair, WhoFi risque d’ouvrir une porte à une surveillance de masse, en particulier dans les bâtiments, ce qui déjà le cas avec les caméras de surveillance, mais à l’intérieur d’un cadre légal.


Perspectives


Les travaux en cours explorent deux axes principaux :


• Renforcer la protection de la vie privée via des techniques de « CSI fuzzing » (brouillage volontaire des signaux) et de randomisation.


• Étendre la méthode à l’identification d’objets ou d’animaux, ouvrant la voie à une traçabilité sans étiquettes physiques ( RFID ).


• Améliorer encore le taux de reconnaissance pour atteindre 100 % ou presque, particulièrement dans une foule dense.


À plus long terme, l’association de WhoFi avec d’autres capteurs (ultrasons, Bluetooth) pourrait donner naissance à des systèmes multimodaux ultra-précis, mais toujours invisibles.


Conclusion


WhoFi représente une avancée technologique intéressante, mais elle s’inscrit dans un débat plus large, que nous abordons souvent : jusqu’où peut-on aller dans la surveillance sans compromettre gravement les libertés individuelles ?


Et cette question est déjà présente dans l’espace public avec l’arrivée massive de la vidéo surveillance qui présente, peu ou prou, les mêmes dangers…


En définitive, si l’usage du Wo-Fi est pour l’instant expérimental, les applications potentielles — dans la sécurité, le commerce, ou même la publicité ciblée — sont nombreuses, et potentiellement invasives, à l’instar de la vidéo surveillance, qui ne se prive pas de nous pister à l’intérieur des bâtiments, voire dans toute une ville avec le renfort de l'IA.


En revanche, le faible coût du système pourrait effectivement favoriser sa diffusion, car les réseaux Wi-Fi existants sont en mesure de l’accueillir, discrètement, sans grande modification.

1 commentaire


bernardolivierbernard
il y a 3 heures

très intéressant !

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